dimanche 2 août 2015

LA FUITE DES CERVEAUX, UN PROCESSUS BICEPHALE DEPLOYE DANS LES DEUX SENS

LA FUITE DES CERVEAUX, UN PROCESSUS BICEPHALE DEPLOYE DANS LES DEUX SENS
FAC-SIMILE DU COMMERCE TRIANGULAIRE DANS SES CONDITIONS, SES CRITÈRES ET SES EFFETS

SIGNE D'UN DYSFONCTIONNEMENT DU PROCESSUS DE MONDIALISATION

Dans l'article précédent, une définition a été faite sur les différentes catégories composantes de la fuite des cerveaux en Afrique. Toutefois, dans l'intérêt du présent article, un petit rappel est utile.
Dans cette perspective, disons brièvement que la «fuite des cerveaux» est un processus bicéphale dans la mesure où, elle se déroule dans les deux sens, d'une part, depuis l'Afrique, et d'autre part depuis les pays d'accueil. D'où, il convient de parler de «fuite de cerveaux» au départ (1), et «fuite de cerveaux» à l'arrivée (2).

1) La «Fuite des cerveaux au départ : un processus visible et manifeste

Ce spécimen de processus de «Fuite des cerveaux» qui se manifeste au départ des pays africains est le plus connu et le plus évoqué. En effet, on parle en général de la «fuite des cerveaux» en Afrique pour désigner les candidats à «la fuite des cerveaux» au départ, depuis le contient africain. La caractéristique de ce type de «fuite des cerveaux» est qu'il est un acte spontané et volontaire de l'agent migratoire, qui, pour des motifs divers (familiaux, économiques, politiques, sociaux, culturels...etc.) décide en son âme et conscience, d'aller se chercher ailleurs, dans les pays développés, dans l'espoir d'une vie meilleure.
Cependant, en dehors de cette catégorie de migrants volontaires qui alimente généreusement le mode de la «fuite des cerveaux au départ», en Afrique, une autre catégorie sociale contribue indépendamment de sa volonté, au développement du phénomène, cette fois, depuis les pays d'accueil des migrants, c'est-à-dire, les pays européens voire les pays occidentaux, d'où, le mode de «la fuite des cerveaux à l'arrivée».

2) La «Fuite des cerveaux à l'arrivée» : un processus invisible et subtile

Dans la typologie des processus de «fuites des cerveaux» composée de variété de migrants, d'émigrés et d'immigrés originaires d'Afrique subsaharienne dans les pays occidentaux, ce mode opératoire de «fuite des cerveaux à l'arrivée» est le plus complexe, mais aussi le plus méconnu car beaucoup plus subtile.
Rappelons si besoin, que la différence entre les deux mouvements inverses («la fuite de cerveaux au départ» et «la fuite de cerveaux à l'arrivée») est que, dans le cadre de «la fuite des cerveaux au départ», l'acte de migrer, d'émigrer et d'immigrer est en général un choix des agents migratoires eux-mêmes, celui d'un proche parent, ou celui d'un tiers. Tandis que le mouvement inverse de «la fuite des cerveaux à l'arrivée» a lieu dans les pays d'accueil, avec la spécificité que, le phénomène est involontaire aux agents concernés, en tant qu'il ne leur laisse aucun choix. En effet, dans les pays d'accueil, des mécanismes juridiques sont mis en place pour empêcher le retour facile des immigrés dans leurs pays d'origine. C'est dans ce processus de «fuite des cerveaux à l'arrivée», que l'on retrouve les catégories suivantes :
  • les descendants des Africains victimes de la déportation qui ont été naturalisés citoyens des pays esclavagistes,
  • les migrants diplômés ou des bras valides sur les routes et sur les mers,
  • les immigrés clandestins n'ayant pas droit au titre de séjour et ne pouvant retourner dans leurs pays d'origine, sous peine de ne plus pouvoir revenir dans leurs pays d'accueil,
  • les enfants d'immigrés nés sur les territoires des pays d'accueil et qui bénéficient de la nationalité de leurs pays de naissance, au nom du droit du sol,
  • les immigrés naturalisés pour plusieurs raisons comme par exemple, la naturalisation par filiation (ascendance et descendance), la naturalisation pour raisons matrimoniales, la naturalisation pour raisons de services rendus à l’État...etc.
Entre dans cette catégorie de naturalisés, celles et ceux qui, pour diverses raisons ont en commun le fait d'être déchus de plein droit de leur nationalité originelle au nom du principe du non-cumul des nationalités ; ce qui prive leurs pays d'origine de leurs talents...etc., agrémentant à souhait le phénomène de la «fuite des cerveaux» en Afrique.

Au bilan, le processus de la «fuite des cerveaux» à l'arrivée implique des catégories diversifiées. Rappelons au besoin, que le propre de ce mode opératoire de «la fuite des cerveaux à l'arrivée» est qu'il est basé sur des mécanismes juridiques nourris des lois des pays d'accueil, et non pas sur la volonté des personnes qu'il concerne. Ce qui fait que le processus de «la fuite des cerveaux à l'arrivée» est méconnu parce qu'il est très subtile. Et, il est très subtile parce qu'il donne à penser qu'il provient du souhait de ses victimes, vu que dès le départ, ces dernières ont manifesté leur souhait de venir en Europe, en occident. Et en plus, par des formalités administratives, elles demandent à obtenir spontanément la nationalité de leurs pays d'accueil. Tout cela brouille les cartes car ces demandes spontanées de nationalité des pays d'accueil sous-entendraient pour certains que les demandeurs renieraient leurs origines, leurs pays d'origines.
Au fond, les motifs justifiant de la mise en place de dispositifs pour alimenter la «fuite des cerveaux à l'arrivée» dans les pays d'accueil, dispositifs dont l'Afrique est principalement victime sont une intention prêtée aux immigrés, jamais prouvée, parce que de toute façon improbable. Parions que si jour, la question était soulevée, les auteurs de ces dispositifs n'auront qu'une réponse : «s'ils ne veulent pas de nos dispositifs, qu'ils rentrent chez eux.»
Pour clore ce chapitre récapitulatif, retenons simplement que la «fuite des cerveaux» en Afrique n'est pas un processus monocéphale ayant uniquement lieu qu'au départ de l'Afrique, mais bien un fléau bicéphale qui a lieu dans les deux sens, aussi bien au départ de l'Afrique, qu'à l'arrivée dans les pays d'accueil.
C'est le lieu de le dire, «la fuite des cerveaux dans les deux sens», c'est-à-dire, «la fuite des cerveaux au départ» et «la fuite des cerveaux à l'arrivée» est dommageable à l'Afrique qu'elle dépeuple de ses forces vives, et appauvrit ; d'où, en l'espèce, dans son organisation et son fonctionnement, le système de «la fuite des cerveaux dans les deux sens» qui prive l'Afrique de ses élites et de ses ressources cérébrales est une reproduction du code du commerce triangulaire (I), en même temps que ce système constitue un vrai signe de dysfonctionnement du processus de Mondialisation (II).

  1. LA FUITE DES CERVEAUX DANS LES DEUX SENS
    AGGIORNAMENTO DU CODE DU COMMERCE TRIANGULAIRE
On peut dire que dans ses conditions, ses critères et ses effets, le système de la «fuite des cerveaux dans les deux sens» reproduit le système du Commerce Triangulaire (A), et le plus déplorable est la caution explicite dont ce système pervers bénéficie de la part d'une grande partie des Africains (B).

A) La «fuite des cerveaux dans les deux sens» : un système pervers doublé d'un fac-similé du système du Commerce Triangulaire

Dans la qualification «Fuite des cerveaux» se dégage une mise en exergue d'un organe du corps humain : le cerveau.
Or, communément, le cerveau est désigné pour parler de la rationalité et de l'intelligence chez l'être humain. Cela veut dire que le cerveau est un organe essentiel dans le corps humain. Du coup, à la fin du 20ème siècle et début du 21ème siècle, le fait que la fuite des Africains vers les pays développés ne concerne qu'une catégorie sociale, donnée pour être les «cerveaux africains», c'est-à-dire, «les têtes pensantes» de l'Afrique, voilà qui montre qu'il s'agit bien d'une sélection. Cela devient inquiétant dans la mesure où, dans l'histoire des rapports entre le continent africain et les pays occidentaux, un autre processus a été fondé sur la pratique sélective : il s'agit du processus du commerce triangulaire, déployé sur les comptoirs négriers. A cette occasion, il était question de prendre à l'Afrique ses «bras valides» pour défricher les champs de canne à sucre.
«Bras valides», encore des parties du corps humain, à la manière des «cerveaux».
On notera ici que pareillement que le mot «cerveau» renvoie aux «têtes pensantes», les «bras valides», de par l'adjectif qualificatif «valides» excluent d'emblée tout handicap, toute infirmité et toute maladie. Voilà pourquoi la notion de «bras valides» renvoie aux notions de «bonne santé», de «corps bien portants». Ainsi, était manifestement opérée la sélection entre Africains déportables et Africains non-déportables.
D'où, dans le code de ce Commerce Triangulaire qui demeure de triste mémoire, à cause de la qualité des «marchandises» échangées, - qui n'étaient autres que des êtres humains, du côté de l'Afrique, - contre la pacotille du côté des esclavagistes, les conditions (1) et critères (2) d'achat des esclaves étaient sélectifs, et très avantageux pour la demande (les acheteurs d'esclaves), et les effets (3) désavantageux pour l'offre, c'est-à-dire l'Afrique.
  1. Une remise à jour des conditions du Commerce Triangulaire dans le processus de la «fuite des cerveaux dans les deux sens»
Le commerce triangulaire ne reposait que sur une seule condition : trouver une main d’œuvre servile en provenance d'Afrique subsaharienne. C'est dire qu'une seule population était visée : la population afro-subsaharienne. Pareillement, au 21ème siècle, non seulement la fuite des cerveaux vers les pays occidentaux est majoritairement dominée par les populations africaines, mais encore, le principe de non-cumul des nationalités occidentales avec d'autres nationalités ne pèse que sur les nationalités africaines. Ainsi, qu'il s'agisse du Commerce Triangulaire ou de la «fuite des cerveaux dans les deux sens», une population est visée : la population afro-subsaharienne.
Là-dessus, il n'y a pas d'équivoque. Qu'en est-il des critères inspirant la mise en œuvre des deux systèmes ?
  1. Une conformité entre les critères du code du Commerce Triangulaire et les critères du code de l'immigration des «cerveaux africains»
Durant le Commerce Triangulaire, la qualité des esclaves vendus était conforme aux exigences des esclavagistes. Pareillement, dans le cadre de la «fuite des cerveaux dans les deux sens», ce sont les exigences des pays d'accueil qui sont satisfaites.
Ainsi, de même que les négriers exigeaient que les esclaves qu'ils achetaient aux Africains soient des hommes et des femmes Africains parmi les plus beaux, les plus forts, les plus costauds, les plus typés, les plus racés et ayant une meilleure santé, et que par dessus tout, le voyage des esclaves était celui du non-retour, de même, au 21ème siècle, en Occident, les exigences des pays d'accueil des migrants africains s’apparentent bien aux exigences des négriers.
Si les négriers en leur temps voulaient «les bras valides», les pays occidentaux au 21ème siècle veulent quant à eux «les cerveaux» africains. Il suffit d'écouter parler les dirigeants occidentaux sur leurs politiques d'immigration pour s'en convaincre. Dans leurs discours, les variables d'occurrence qui reviennent sont les suivantes : «les quotas», «Immigration choisie » et non pas «immigration subie», «les régularisations au cas par cas», «le concept d'immigration intelligente»...etc.
La France ne s'en cache même plus. Elle, qui parle urbi et orbi de «la simplification de la délivrance des visas de circulation, valables entre six mois et cinq ans, pour les "talents étrangers", «universitaires, scientifiques, artistes...». Une vraie sélection entre les candidats à l'immigration qui rappelle les exigences et les critères des temps du Commerce Triangulaire.
Par dessus tout, le retour à leur pays d'origine des immigrés Africains est rendu difficile par certains mécanismes juridiques mis en place dans les pays d'accueil. Ce qui signifie tout simplement pour eux que le voyage de non-retour leur est appliqué, comme aux temps de l'esclavage.
En un mot comme en mille, tous ces critères sélectifs fixés par les politiques publiques dans les pays occidentaux en matière d'immigration ne laissent pas de place au doute sur le fait que le code du système de la «fuite des cerveaux dans les deux sens» n'est qu'une reprise du code du système du Commerce Triangulaire. Et que les deux systèmes produisent les mêmes effets.

2) Les effets de la «fuite des cerveaux dans les deux sens», une réplique des effets du commerce triangulaire

Il est évident que comme dans le cadre du Commerce Triangulaire, où, les Africains déportés ont systématiquement été naturalisés et confisqués pour ne plus retrouver leurs patries d'origine, cet arsenal juridique en vigueur dans les pays d'accueils des migrants africains au 20ème-21ème siècle, lequel confisque d'office les immigrés dans les pays d'accueil parce qu'il les dépouille de leurs nationalités d'origine - a pour effet de dépeupler puis d'appauvrir subtilement, mais manifestement, l'Afrique, sous le fallacieux prétexte de la «fuite des cerveaux».
De c marché de dupe, l'Afrique est pitoyablement perdante à tous points de vue, lorsque les pays d'accueil sont les gagnants à tous les niveaux.
Tout d'abord, sur un plan démographique, l'Afrique se dépeuple dans le processus de «la fuite des cerveaux dans les deux sens».
Ensuite, au plan économique, et surtout en matière d'expertise, l'Afrique perd une part substantielle de ses ressources humaines. Elle est appauvrie.
En effet, non seulement les candidats au départ sont majoritairement des diplômés de haut niveaux, mais encore sur place, dans les pays d'accueil, des milliers d'Africains formés à de haut niveaux y sont retenus par des mécanismes juridiques qui leur font perdre leur nationalité d'origine pour certains, quand pour d'autres, ils sont pris au piège de l'immigration clandestine. Et que dire des talents des descendants des Africains déportés depuis des siècles dont on a malicieusement, et expressément effacé de la mémoire, les pays d'origine ?
Disons simplement que tous ces Africains constituant une main d’œuvre qualifiée ne peuvent mettre leurs talents au profit de l'Afrique. Tout bêtement. Confisqués qu'ils sont dans les pays d'accueil.
A l'inverse, s'agissant des pays d'accueil, leur économie et leur démographie se trouvent bonifiées par ce capital humain venu d'Afrique depuis des temps immémoriaux jusqu'aujourd'hui, et dont le nombre ne cesse de croître avec les guerres et autres calamités sur le continent noir.
Mais, le profit des pays d'accueil ne se limite pas qu'au plan économique. En effet, au plan politique aussi, cette population d'Africains présente sur leurs territoires constitue pour les femmes et hommes politiques d'occident, un fond de commerce considérable à deux niveaux :
  • d'une part, la population africaine présente sur leurs sols représente pour les acteurs de la politique occidentale, une monnaie d'échange pour faire du chantage aux pays africains,
  • d'autre part, cette population africaine d'immigrés fournit aux classes politiques des pays occidentaux des variables d'ajustement telles «Étrangers», «Immigration», «Nationalité», «Citoyenneté», «assimilation», «intégration»...etc. pour alimenter les polémiques et autres débats politiciens entre partisans ou opposants politiques. Toutes manœuvres que ces variables d'ajustement induisent sont considérables, et les bénéfices politiques, une source inépuisable car il suffit de savoir manœuvrer pour se constituer un gros bétail électoral.
En définitive, qu'il s'agisse du Commerce Triangulaire ou qu'il s'agisse de la «Fuite des cerveaux dans les deux sens» en Afrique, c'est du pareil au même : vu que ce sont les deux faces d'une même pièce.
La diaspora ne risque pas de sortir de l'auberge. En effet, au regard de la réalité qui prévaut en Afrique, on constate que d'une manière ou d'une autre, les Africains cautionnent eux aussi le phénomène de «la fuite des cerveaux dans les deux sens».

B) Une caution explicite du phénomène de la «fuite des cerveaux dans les deux sens» par les Africains

En observant l'enthousiasme suscité par l'immigration au sein des populations africaines mais aussi certaines politiques publiques dans plusieurs pays africains, on remarque que non seulement les populations africaines donnent un blanc seing au processus de «fuite des cerveaux dans les deux sens»(1), mais encore qu'à un niveau étatique, certains pouvoirs publics en Afrique cautionnent ouvertement la «fuite des cerveaux dans les deux sens» (2).

1) Soutien des populations africaines au phénomène de la «fuite des cerveaux dans les deux sens»

Ce soutien des populations africaines au phénomène de la «fuite des cerveaux dans les deux sens» se traduit par le rêve primordial de tout Africain d'immigrer en occident, mais aussi par le rêve de toute famille africaine d'avoir un fils, une fille, un parent ou plusieurs en occident.
En effet, en milieu africain, le fait de s'exiler en occident accroît le pedigree social des individus et celui de leurs familles dans la cité ; lesquels se retrouvent ainsi gratifiés d'un honneur du jour au lendemain, de même qu'ils sont auréolés d'une gloire supplémentaire.
En clair, l'individu qui immigre en occident représente un capital social pour lui-même mais aussi pour les siens. Ceci explique l'humiliation par des moqueries à laquelle s'exposent les Africains rapatriés d'occident et leurs familles. En effet, revenir d'occident pour revivre dans son pays d'origine qu'on a quitté plus tôt est vu comme une déchéance sociale, couplée du débit du capital social dont on s'est crédité entre temps.
Par ailleurs, le fait d'avoir un fils, une fille, bref, un parent ou plusieurs en occident accroît le pouvoir d'achat des familles. Pour des raisons économiques donc, plusieurs familles incitent leurs membres à partir résider en occident. Définitivement.
On comprend en l'espèce que «la fuite des cerveaux dans les deux sens» soit encouragée par les populations africaines qui sont pourtant les premières à pâtir des conséquences désastreuses de ce fléau. Ceci dit, les pouvoirs publics africains participent eux-mêmes à l'aggravation du fléau de la «fuite des cerveaux dans les deux sens.»

1) Le rôle des pouvoirs publics africains dans «la fuite des cerveaux dans les deux sens»

En Afrique, aucune place significative n'est accordée aux diasporas. Depuis les anciennes diasporas issues du Commerce Triangulaire jusqu'aux diasporas récentes issues de l'immigration, aucun cahier des charges n'est défini dans aucun pays, ni même à un plan continental. Aucun dispositif n'est déployé pour le retour des diasporas, ni aucune mesure législative n'est prise sur tout le continent africain, en vue de contrecarrer les mécanismes juridiques déployés dans les pays d'accueil avec pour but, la confiscation des migrants Africains qui nourrit le fléau de la «fuite des cerveaux dans les deux sens». Bien au contraire, tout ce que les pouvoirs publics africains font, c'est d'aggraver à leur tour, la «fuite des cerveaux dans les deux sens» par des lois ignobles. Par exemple, dans plusieurs pays africains, des dispositions constitutionnelles exigent que pour postuler à certaines fonctions régaliennes comme la fonction présidentielle, il faut avoir vécu pendant un certain nombre d'années dans le pays d'origine, et ne pas s'être prévalu d'une autre nationalité. Avec de telles lois, c'est la diaspora qui est visée, et c'est elle qui est exclue de la vie politique des pays d'origine.
Et voilà comment certaines politiques publiques en Afrique contribuent à éloigner des fils et filles d'Afrique de la gestion de l'Afrique, mais encore, aggravent le fléau de la «fuite des cerveaux à l'arrivée».
Dans ce méli-mélo, on pourrait se demander, où, se trouve la place des diasporas africaines et la réponse est directe: les diasporas africaines n'ont pas de places, elles sont suspendues entre deux mondes, leurs pays d'origine et leurs pays d'accueil.
En effet, face à cette situation double consistant pour les diasporas africaines d'une part, à être incités à immigrer en occident pour ne plus retourner en Afrique par les familles sous peine d'être humiliées et raillées, puis, à être empêchés par les pouvoirs publics africains d'accéder aux fonctions régaliennes ; et d'autre part, à être bloqués, voire confisqués dans les pays d'accueils par des mécanismes juridiques d'un autre âge fait que les diasporas africaines sont suspendues en l'air, n'appartenant ni à leurs pays d'origines, ni à leurs pays d'accueil. D'où, le drame de ces populations.
Le plus sidérant, c'est que le fléau de la «fuite des cerveaux dans les deux sens» encouragé par des lois contraignantes aussi bien dans les pays de départ en Afrique que par les pays d'accueil des migrants africains n'émeut personne alors qu'il est en porte à faux avec le processus de la Mondialisation au 21ème siècle.


II) LA FUITE DES CERVEAUX, UN SIGNE DE DYSFONCTIONNEMENT DU PROCESSUS DE MONDIALISATION

L'examen attentif du processus de la «fuite des cerveaux dans les deux sens» révèle des dysfonctionnements dans le processus de la Mondialisation en ceci que la Mondialisation implique la rupture des frontières douanières (A) et non pas la rupture des frontières politiques (B)

A) Le problème de la rupture des frontières douanières

Sous sa forme actuelle, d'abord, la Mondialisation privilégie beaucoup plus l'économie que les personnes car dans son déploiement, il est manifeste qu'un accent particulier est mis sur la libre circulation des biens et des capitaux. Cela se voit par l'ouverture des économies nationales sans exception sur un marché mondial. Par ailleurs, alors que le système de la Mondialisation est censé véhiculer l'interdépendance entre les hommes, c'était sans compter sur la mauvaise foi des promoteurs de la Mondialisation qui sont les premiers à privilégier plutôt «le pognon» que le bonheur des êtres humains. C'est ainsi qu'au moment où les migrants sont refoulés aux frontières des pays, l'argent quant à lui circule aisément par la libéralisation des échanges, la fluidité des mouvements financiers, la déréglementation, la délocalisation des activités commerciales, industrielles et financières, le développement des moyens de transports et télécommunications.
Du coup, à nos corps défendants, l'aspect géographique de la Mondialisation qui consiste à faciliter les interactions entre les peuples du monde est piétiné. Il en résulte que dans le processus de Mondialisation, tout est fait pour affaiblir la notion de «village planétaire» censée développer les échanges entre les individus et les cultures. Et si on est dans une telle situation, c'est tout simplement parce que les gestionnaires de la Mondialisation sont les multinationales, désormais substituées aux pouvoirs publics dans la prise des décisions publiques. Du coup, ce sont les multinationales qui font la pluie et le beau temps dans le dispositif de la Mondialisation. Seules elles définissent les stratégies sur la localisation ou la délocalisation des entreprises et des banques ainsi que l'approvisionnement et le financement de ces dernières.
En tout cas, si de tout temps, elles sont eu le dernier mot sur la création de débouchés et le recrutement des agents dans le domaine privé, sous l'ère de la Mondialisation, même le domaine public est de plus en plus dévolu aux multinationales dans certains pays. Par conséquent, les investissements mais aussi les circuits de commercialisation relèvent désormais de la compétence des multinationales qui décident, à l'échelle mondiale, en fonction de leurs intérêts, en examinant les avantages et les inconvénients qu'elles tirent des solutions nationales. C'est peu de dire que le capitalisme a le vent en poupe au 21ème siècle. Karl Marx se serait suicidé s'il vivait encore aujourd'hui.
Avec l'apogée des multinationales qui tiennent tous les cordons de la bourse mais surtout toutes les clés de la Mondialisation, on comprend que la préoccupation de la Mondialisation sous sa forme actuelle ne soit pas le sort des individus mais plutôt le profit financier. D'où, la primauté accordée à la rupture des frontières douanières et non pas à l'ouverture des frontières politiques est un facteur aggravant du phénomène de la «fuite des cerveaux dans les deux sens».
C'est en cela que l'Afrique, même sans avoir inventé la Mondialisation peut être le continent qui corrige les défaillances de ce système, de plus en plus caduque.

B) Un déficit d'ouverture des frontières politiques

Si la rupture des frontières douanières privilégie le «fric», la rupture des frontières politiques quant à elle privilégie tout d'abord les personnes, les individus.
Cela veut dire que dans la Mondialisation sous sa forme actuelle, s'il n'y avait pas déficit d'ouverture des frontières politiques, nulle part au monde, et plus précisément en Afrique, personne n'aurait à déplorer «la fuite des cerveaux dans les deux sens» car, avec des frontières politiques ouvertes, d'où que l'on vienne, et où que l'on aille, on ne perdrait jamais sa nationalité d'origine. Bien au contraire, avec une ouverture des frontières politiques, on aurait plusieurs nationalités sans pour autant être dépossédé de sa toute première nationalité.
De ce point de vue, la vraie rupture des frontières qui puisse régler le dépeuplement et l'appauvrissement de l'Afrique par le fléau de la «fuite des cerveaux dans les deux sens» est celle portant sur la rupture des frontières politiques.
En effet, dans le cadre d'une politique de rupture des frontières politiques, plus rien, ni personne ne retient personne, ni en deçà, ni même au-delà d'un pays. Cela veut dire que les Africains comme tous les habitants du monde iraient dans tous les sens, travailler n'importe où, et n'importe quand, dès lors qu'ils le veulent, et retourner chez eux quand ils veulent, sans qu'il n'y ait des lois qui les confisquent dans les pays d'accueil, ni d'autres lois qui leur interdisent de rentabiliser leurs talents dans leurs pays d'origine, qu'ils auraient quitté tantôt. Ce serait tout simplement le respect du droit à la libre circulation, du respect de liberté d'entreprendre.
Au fond, devant la prépondérance accordée à l'ouverture des douanières au détriment de l'ouverture des frontières politiques rendues de plus en plus hermétiques, en pleine mondialisation, l'Afrique qui est la première à souffrir d'un tel système rétrograde qui le dépeuple et l'appauvrit, par le fléau de «la fuite des cerveaux dans les deux sens» doit pouvoir saisir le taureau par les cornes, et battre le fer tandis qu'il est chaud. Cela passe par le fait pour l'Afrique, de décréter, d'office, l'ouverture des frontières politiques pour ses citoyens sur son sol, et au sein du Grand Triangle, mais aussi partout dans le monde où ses citoyens se trouvent. Une telle initiative de l'Afrique serait assurément un interstice ouvert dans la matrice technocratique, aride, cupide, insensible, sans cœur ni âme et cruelle de la Mondialisation sous sa forme actuelle, en même temps que l'Afrique donnera au processus de Mondialisation en cours, une âme.
L'ouverture de cet interstice dans la Mondialisation, c'est la seule solution au fléau de «la fuite des cerveaux dans les deux sens» et voilà pourquoi elle constitue une priorité et le but principal de l'UPACEB, en même temps qu'elle est l'objectif initial du Passeport Ébène.
Mais alors, dans l'absolu.



Yéble Martine-Blanche OGA épouse POUPIN

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