dimanche 17 janvier 2016

LES ASPIRATIONS PROFONDES DES PEUPLES AFICAINS
A LA DEMOCRATIE ET AUX DROITS DE L'HOMME
EN BUT A UNE REALITE  : L'INCOMPATIBILITE ENTRE FEODALITE ET REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE

Au village africain, la sagesse enseigne que l'attention, le courage, la maîtrise de soi, l'écoute et le questionnement sont consubstantiels à l'apprentissage. Cela veut dire que pour la sagesse africaine, quiconque veut apprendre dans la vie, les vertus cardinales à cultiver sont l'attention, le courage, la maîtrise de soi, l'écoute et le questionnement. Conformément à la sagesse africaines, ces vertus cardinales sont valables dans le cadre tout apprentissage sans exception. Et la sagesse africaine précise que tout au long de la vie humaine, on apprend à toute occasion. Et toute occasion est faite pour tirer des leçons et apprendre. Et il n'y a pas une seule occasion qui ne puisse offrir des leçons à tirer, des connaissances à apprendre. Ainsi par exemple, l'on apprend sur soi-même en écoutant les autres. Et l'on apprend sur soi-même dans es reproches et autres récriminations formulés par les autres. La sagesse africaine va jusqu'à affirmer que même les injures proférées à l'endroit d'un individu peuvent aider ce dernier à se découvrir autrement. Mais dans tous les cas, les seules conditions requises pour tirer profit de ces occasions d'apprentissage sur la vie, sur l'environnement, sur la société, sur soi-même...etc., sont : l'attention, le courage, la maîtrise de soi, l'écoute et le questionnement.
Tout d'abord, l'attention pour mieux entendre et comprendre l'occasion qui s'offre en apprentissage.
Ensuite, le courage pour aller jusqu'au bout de l'apprentissage. Et puis, la maîtrise de soi pour éviter l'emportement, devant les situations de choc. Par ailleurs, l'écoute pour une qualification juste de ce que l'on entend, afin d'éviter des contresens, des quiproquos, des amalgames et des confusions.
Enfin, le questionnement, pour analyser en profondeur, l'objet propice à l'apprentissage. Rappelons que ce processus d'apprentissage proposé par la sagesse africaine est difficilement applicable dans les situations conflictuelles. En effet, comment être attentif lorsque l'on se retrouve devant l'adversité ? Et comment avoir le courage d'écouter une personne vous débiter des insultes ? Est-il possible d'avoir la maîtrise de soi, en gardant le sang froid face à ce qui s'assimile à des injures par exemple ? Peut-on résister à l'esprit de vengeance quand l'on se sait attaqué à tort ou à raison, de façon physique ou de façon verbale ? Et pour finir, peut-on consacrer son temps à se questionner sur des propos tenus par une personne considérée comme hostiles à nos intérêts communs et personnels ?
On le voit bien, le processus d'apprentissage selon la sagesse africaine est difficile. Surtout dans monde dominé par la concurrence où l'on cultive l'esprit du tic au tac. En effet, cette culture du tic au tac empêche considérablement l'Afrique au Sud du Sahara d'apprendre, et de progresser. C'est exactement ce qui s'est passé il y a quelques années. En effet, il y a quelques temps, la rumeur a attribué à l'ancien président de la République Française, Monsieur Jacques Chirac, cette phrase :« la Démocratie était un luxe pour l'Afrique ». Si nous avions opté pour le processus d'apprentissage préconisé par la sagesse africaine tel que détaillé ci-dessus, voici quelle aurait été notre attitude :
Tout d'abord, on se serait montré attentif devant cette affirmation. Ensuite, on ferait preuve d'un courage à tout épreuve pour aller à la compréhension de cette assertion. Et puis, chacun de nous allait se maîtriser pour éviter la colère et l'emportement ; chacun de nous aurait gardé son sang froid, en vue d'une sérénité permettant une interprétation objective de cette phrase. En outre, on serait à l'écoute, en cherchant à comprendre ce qu'a voulu nous dire le président Jacques Chirac. Enfin, on se serait posé des questions non seulement sur nous-mêmes, mais encore les mobiles qui ont poussé le Président Chirac à s'exprimer ainsi.
A défaut de nous inscrire dans le processus d'apprentissage africain en procédant étape par étape au découpage de la pensée chiraquienne, chacun en est allé de sa propre interprétation. Comme toujours, lorsqu'il s'agit d'un problème concernant l'Afrique. Guidé par l'esprit traditionnel du colportage de l'information, esprit du colportage très libre mais aussi très volatile, chacun a décidé de véhiculer cette phrase du président Chirac selon son entendement. Les uns ont évoqué un racisme du président Chirac envers les Africains. D'autres y ont vu une manœuvre pour empêcher l'Afrique d'accéder à la Démocratie. Certains y ont vu de pures insultes. Et une fois la colère tombée, plus rien n'a suivi. Bien dommage !
« La démocratie est un luxe pour l'Afrique. » Dixit Monsieur Jacques Chirac. Voilà une phrase qui a fait couler beaucoup d'encre, mais dont on a tiré aucune leçon pour faire progresser l'Afrique. Il est utile de procéder à une analyse de cette phrase attribuée au président Jacques Chirac.
D'emblée, la Démocratie. C'est une forme de gouvernement du peuple par le peuple. En l'espèce, le peuple est souverain. Quant au mot « luxe », voici comment la lexicographie le définit :
« Pratique sociale caractérisée par des dépenses somptuaires, la recherche de commodités coûteuses ou de biens raffinés et superflus, souvent par goût du faste ou désir d'ostentation. […] Consommation improductive, somptuaire de biens coûteux, raffinés, superflus. […] Ensemble des biens coûteux ou parfois raffinés qui sont consommés ou dont on fait étalage par goût du luxe. »1 Ajoutons que le mot «Luxe» a pour synonymes le gaspillage, l'abondance, l'excès, le superflu, la surabondance. Après ces précisions, la phrase « La démocratie est un luxe pour l'Afrique » du président Chirac peut s'entendre comme : « la Démocratie est un gaspillage, une abondance, un excès, un superflu, une surabondance....pour l'Afrique. » Et si tel est le cas, c'est parce que l'organisation politique des sociétés traditionnelles africaines, laquelle est féodale, et reprise par l'Afrique moderne ne peut pas s'accommoder de la démocratie. Cette organisation féodale rend la Démocratie superflue, elle en fait un excès, une surabondance voire un gaspillage. En clair, la Démocratie est inadaptée au contexte féodale. Et pour mieux comprendre cette inadaptation de la Démocratie à la féodalité, il convient de définir d'une part l'organisation politique des sociétés africaines (I), et d'autre part, l'organisation politique des sociétés modernes, plus précisément, le système républicain II).

    1. L'ORGANISATION POLITIQUE DES SOCIETES AFRICAINS :
      UNE ORGANISATION FEODALE
L'organisation politique africaine basée sur la féodalité est caractérisée par la personnalisation du pouvoir politique (A) et la distributions de droits féodaux (B)

A) Une personnalisation excessive du pouvoir politique

« La Féodalité est un système qui organise le pouvoir politique sur des liens de fidélité, des liens contractuels et sur des liens de parenté et de lignage, la traduction concète en est le Fief. » 2 En Afrique, à cause du système féodal, tout tourne autour de la personne de celles et ceux qui détiennent le pouvoir politique. Tout se passe comme si ces derniers avaient droit de vie et de mort sur l'ensemble de la population. Il faut passer exclusivement par leur intermédiaire pour garantir une vie heureuse à soi-même, et à ses proches. Les contredire, c'est signer son arrêt de mort. En effet, ne pas s'entendre avec le chef, le détenteur du pouvoir, c'est être exclu de tous les services publics. Le système féodal en général encourage :
  • l'autocratie : le gouvernement par un individu
  • l'oligarchie : le gouvernement par quelques individus; parfois un nombre est spécifié
Et en Afrique, le système féodal encourage :
  • l'ethnocratie, appelée aussi la démocratie ethnique : qui est le gouvernement par un groupe ethnique particulier
C'est à cause de cette personnalisation excessive du pouvoir que le président OBAMA disait dans son discours d'Accra : « L'Afrique n'a pas besoin d'hommes forts, mais d'institutions fortes ». En effet, dans le fonctionnement féodal, le chef contrôle tous les pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire. En effet, il nomme ses procès à ces postes clés, et ceux-ci ne sont ni indépendants, ni impartiaux dans l'exercice de leurs fonctions. C'est un pouvoir totalitaire qui s'exerce dans le système féodal. Dans un système féodal, l'existence de nombreuses servitudes pour les individus fait obstacle à la promotion des droits et libertés privés et publics. C'est le suzerain qui distribue, selon son plein gré, son bon vouloir, quelques avantages et privilèges à celle ou celui qu'il agrée.

B) Une distribution arbitraire des droits féodaux

« La Féodalité est une organisation politique et sociale qui a été dominante en Europe de l'Ouest du Xème au XVème siècle. Elle est issue d'une tradition germanique qui lie le chef à son compagnon d'armes, en contrepartie le chef protège ses fidèles et leur confie des missions importantes. » 3
Dans le contexte féodal africain, la distribution des droits féodaux a lieu à plusieurs niveaux :
  • en milieu familial, dans les milieux ruraux, où, les propriétaires terriens sont en général des héritiers de droit masculin et de droit d'aînesse. Les plus jeunes et les filles de la fratrie né bénéficiant d'aucun héritage.
  • Entre citoyens : le racket exercé par certains citoyens sur d'autres citoyens qui sont ainsi dépouillés de leurs biens patrimoniaux est une pratique qui rappelle les impôts primitifs que sont le pillage et le tribut. Des impôts qui portent l'empreinte de la féodalité.
  • En milieu urbain : l'attribution des postes administratifs, économiques, financiers et politiques est arbitraire et n'obéit à aucun critère objectif si ce n'est par fidélité ou par services rendus à celle ou celui qui gère les postes en question.
On le voit bien, le système féodal n'est pas comparable au système républicain, c'est la nuit et le jour.

II) L'ORGANISATION POLITIQUE DES SOCIETES MODERNES : LE SYSTEME REPUBLICAIN

L'organisation politique des sociétés modernes repose sur le système républicain fondé sur la démocratie (A) et la reconnaissance de droits civiques et des droits de l'homme aux citoyens (B)

A) La Démocratie : forme de gouvernement valable pour les sociétés modernes et républicaines
La République vient du mot latin « « res publica », qui veut dire « affaire publique » ou plus littéralement « chose du peuple ». »4
Au sein de la République, le pouvoir appartient au peuple qui l'exerce par ses élus et à travers les institutions : l'exécutif, le Parlement, la Justice ; mais aussi à travers les fonctions : le Président de la République, le Premier Ministre, les Ministres...etc. Le peuple étant souverain, tout est public, et rien n'est personnel. Rappelons-nous, le mot Public vient du mot peuple. Alors que le mot personnel se rattache à tout ce qui provient d'une ou plusieurs personnes. De ce fait, contrairement au système féodal, au sein d'une République, aucune autre forme de gouvernement n'est admise à part la Démocratie qui est « le gouvernement par le peuple, soit directe (par référendum ou assemblée populaire) soit par des élections (forme représentative) »5 «Le terme démocratie (du grec ancien δημοκρατία / dēmokratía, aujourd'hui souvent interprété comme « souveraineté du peuple », combinaison de δῆμος / dêmos, « peuple » et κράτος / krátos, « pouvoir », ou encore kratein, « commander »), est le régime politique dans lequel le peuple a le pouvoir »6 Dans une République réellement démocratique, on privilégie le gouvernement par la Méritocratie, c'est-à-dire, le gouvernement fondé sur le mérite et non les privilèges. De même, l'administration est de type bureaucratique. Pareillement, la République démocratique est caractérisé par le respects des droits de l'homme et des droits civiques
    B) Une reconnaissance de droits civiques et des droits de l'homme aux citoyens
On parle de droits civiques pour souligner le fait que les citoyens sont électeurs et éligibles à leur majorité. Les droits civiques ne peuvent être déniés aux individus sauf s'il s'agit de mineurs, d'adultes frappés d'incapacité, placés sous tutelle ou sous curatelle, s'il s'agit de personnes privées de l'exercice de leurs droits civiques à cause d'actes répréhensibles. Dans tous les cas, seul la loi peut exclure les citoyens de l'électorat. S'agissant des droits de l'homme, ils figurent dans la Déclaration des Droits de l'Homme (DDHC)de 1789, dans le préambule de la Constitution française de 1946 et dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948. Certains sont dit imprescriptibles et ce sont : le droit de propriété, le droit à la sûreté, le droit à la sécurité, le droit à la résistance à l'oppression. Or, si l'on s'en tient aux droits civiques, c'est-à-dire, le droit d'être électeur et le droit d'être éligible, on constate qu'en Afrique, dans de nombreux pays, ces droits civiques sont bafoués. Des candidats à des élections ont ont été arbitrairement exclus. Parfois, il existe des lois iniques expressément mises en place pour empêcher certains citoyens d'être candidats à certaines élections. Tantôt, certains candidats ont vu leur élection volée. Cela veut dire qu'on les a laissés se porter candidats à l'élection. Ils ont gagné l'élection. Mais, leur victoire leur a été subtilisée, et, à la place de leur victoire, la malice a consacré leur défaite. Et si on en vient au droit de vote, là aussi, force est de constater que ce droit n'est pas respecté. En effet, en Afrique, vote qui veut. Même si on ne remplit pas les conditions requises pour être électeurs, on vote quand même. Du coup, des mineurs votent, des étrangers votent, des incapables physiques et moteurs votent, et des morts aussi votent.
Pour les droits de l'homme, il suffit de lire la presse africaine pour se rendre compte qu'ils n'existent même pas. Avec l'insécurité grandissante, les droits imprescriptibles que sont la sécurité, la sûreté, le droit de propriété et la résistance à l'oppression sont comme caduques.
Dans ces circonstances, que peut-on penser de la réflexion du Président Jacques Chirac lorsqu'il a dit : « La Démocratie est un luxe pour l'Afrique » ?
On peut répondre que sa réflexion est pertinente, judicieuse et juste pour deux raisons :
  1. La Démocratie suppose que l'on soit dans une République. Ce qui n'est pas le cas de l'Afrique qui a un fonctionnement politique de type féodal. On ne peut pas greffer un système politique en l'espèce la Démocratie sur un autre système politique, c'est-à-dire, la Féodalité. Dans ce cas, c'est effectivement un « luxe », c'est-à-dire, une surabondance, un superflu, un excès, un gaspillage.
  2. Dans une Démocratie, c'est-à-dire dans une République Démocratique, les droits de l'Homme sont respectés. Or, ce n'est pas le cas de l'Afrique où les droits et libertés sont foulés au pied, parce que justement, nous sommes simplement dans des républiques de nom. Mais dans les faits, nous sommes dans un régime féodal. Or, il est de notoriété que le système féodal méconnaît les droits de l'Homme. C'est la République Démocratique qui octroie les droits de l'Homme.
Au terme de cette réflexion, on le voit bien, les aspirations profondes des peuples africains à la démocratie et aux droits de l'Homme sont sérieusement compromis par le système féodal. En effet, il y a une incompatibilité entre la République démocratique et la Féodalité.
Et c'est le président Guinéen Ahmed Sékou Touré qui a raison. A ces dernières années de pouvoirs, il a effectué une visite officielle en France dont les vidéos sont encore visibles sur Internet. Dans son discours aux officiels français, il a justement soulevé cette difficulté de promouvoir la Démocratie dans une Afrique à l'organisation féodale. Paix à son âme !

Le travail qui s'impose en Afrique en ce début du 21ème siècle est assurément le démantèlement total de ce système féodal, seule condition pour promouvoir une République Démocratique sincère et vraie, ainsi que les droits de l'Homme. Le Président Burkinabè Thomas Sankara avait perçu le problème, lui qui avait commencé par démanteler la structure féodale dans son pays. Paix à son âme !

En tout cas, l'UPACEB est prête à participer pleinement à ce travail incontournable pour l'émergence d'une Afrique moderne et démocratique, respectueuse des droits de l'Homme.


Yéble Martine-Blanche OGA-POUPIN













1http://www.cnrtl.fr/definition/luxe
2http://www.francebalade.com/histo/feodalite.htm
3In Histoire de France, Moyen Age La Féodalité au Moyen-Age
4In Wikipédia
5In Wikipédia

6In Wikipédia

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