LA
DESINTEGRATION EN AFRIQUE
ALIMENT
DU VICE DE L'INCOMPETENCE
SOURCE DE DISCRIMINATION DANS LE SECTEUR BANCAIRE
On
ne pourra pas évoquer les maux qui ravagent l'Afrique sans se
référer à la désintégration systémique de ce continent. Au
21ème siècle, aucun expert crédible, en quelque matière que ce
soit ne peut se passer d'incriminer la désintégration nationale et
continentale en Afrique dans l'analyse des problématiques
africaines. En effet, tout ce qui concerne l'Afrique en matière de
sous-développement passe d'abord, et avant tout, par la
désintégration. Et aucun fléau qui touche l'Afrique au sud du
Sahara n'est concevable sans une prise en compte de la
désintégration. Ainsi, qu'il s'agisse de la famine, des pandémies,
des guerres civiles, de la corruption, du racket, de la détérioration
du service public, du dysfonctionnement structurel de l’État, de
la fragilité des institutions, de tous les facteurs de
sous-développement, à la base, se trouve la désintégration,
c'est-à-dire, la désagrégation de toutes les structures politiques
d'insertion sociale de l'individu. Autant dire que n'importe quel
désagrément qui peut revêtir un caractère bénin dans le commun
des mortels, ailleurs sur un autre continent, en Afrique, le même
désagrément, pourtant bénin sous d'autres cieux peut devenir
calamiteux, à cause des effets de la désintégration nationale et
continentale. De ce fait, inutile de mentionner que pour n'importe
quel chercheur se voulant loyal et honnête intellectuellement dans
l'appréhension systémique des enjeux africains, la désintégration,
en tant que facteur principal de risque aggravant des fléaux sur le
continent noir est un instrument essentiel. Indubitablement, nous
sommes arrivés à un tel niveau de fermentation sociale pour
plusieurs raisons, parmi lesquelles :
- notre égoïsme atavique : s'il est un qualificatif qui sied bien à l'Africain, c'est celui d'égoïste. Déjà, au siècle dernier, dans son mémorable discours intitulé « Living in poverty », l'homme d’État Tanzanien, l'honorable Juilius NYERERE le mentionnait très bien lorsqu'il évoquait le « selfishness » des fils et filles d'Afrique. Cet égoïsme africain est surtout exacerbé par les intellectuels africains qui n'ont jamais pensé à former un groupe homogène de réflexion à un niveau international et continental pour poser les problèmes africains sur la table et en discuter sans complexe, et sans esprits partisan. Par conséquent, encore au 21ème siècle, siècle de la globalisation qui a fait tomber le mur disciplinaire érigé par le positivisme au 19ème siècle, mur disciplinaire tombé pour faciliter la mutualisation des compétences et privilégier les approches systémiques face aux multiples enjeux nationaux et internationaux pour des solutions à la fois efficaces et efficientes, les intellectuels africains sont les seuls au monde à faire des parcours professionnels solitaires. Et pourtant, l'adage dit bien que l'union fait la force. Jusqu'à quand les intellectuels africains le comprendront ? En attendant, le mal atavique africain de la désintégration ne les épargne pas non plus. C'est ainsi que non seulement les intellectuels africains sont victimes de ce mal congénital qui touche l'Afrique à tous les niveaux, mais encore qu'à défaut d'unir leurs forces pour le combattre, ils contribuent eux-mêmes à l'aggraver vu que chacun d'entre eux veut poursuivre son chemin, en excluant tous les autres de son champ d'action. Au fond, en Afrique, il n'y a pas que la communauté nationale et continentale qui est disloquée. L'action collective intellectuelle elle aussi est disloquée, si elle n'est carrément plombée par l'individualisme des intellectuels. Là, où, le ridicule peut tuer les intellectuels africains, c'est lorsqu'ils viennent étaler leurs connaissances sur les plateaux télés pour critiquer les politiques africaines du FMI et de la Banque Mondiale. On se demande alors où ils sont passés pour réfléchir et donner leurs prétendues solutions meilleures, avant que le FMI et la Banque Mondiale n'agissent à leur place ! C'est un autre aspect de l'égoïsme africain : prétendre avoir des réponses et des solutions aux problèmes africains, mais surtout, ne jamais les divulguer, jusqu'à ce qu'un autre apporte sa solution. Seulement là, les critiques des prétendus connaisseurs affluent. Curieux tout de même. En effet, vous dites que vous êtes instruits. Et que mieux que quiconque, vous connaissez les problèmes de votre continent. Mais en même temps, vos solutions, vous ne les révélez pas. Jusqu'à ce qu'un autre vienne accomplir la tâche à votre place. Et vous le critiquez ? D'où vient ce savoir qui ne produit rien si ce n'est de l'Afrique ?En tout cas, plus que jamais, les intellectuels africains de tous bords sont conviés à mettre sur place un comité de réflexion regroupant des experts dans différents domaines aussi bien dans chaque pays, et finalement au niveau continental et international pour réfléchir aux problématiques du continent et apporter des réponses fiables. C'est tout le travail que projette l'UPACEB sous sous sa forme associative.
- Notre manque de patriotisme : l'amour de la patrie qui anime tout citoyen et le conduit au respect des lois et des valeurs républicaines, voilà qui est en Afrique, un produit à valeur politique. Ainsi, pour un grand nombre de femmes et hommes politiques africains, l'amour de la patrie devient utile seulement lorsqu'ils visent la conquête du pouvoir d’État. Pour d'autres hommes politiques à la tête de l’État, il faudra attendre qu'ils soient en difficultés politiques, que leur pouvoir soit menacé disparition, pour qu'ils se souviennent enfin, qu'ils ont besoin d'aimer leur patrie, et surtout, de l'aimer avec l'ensemble de leurs concitoyens. Mais ce patriotisme en Afrique, il n'a pas que valeur politique, il a aussi valeur pécuniaire. En effet, le patriotisme est monnayable en Afrique dans la mesure où il faut parfois payer les citoyens pour les mobiliser à défendre leur propre patrie en danger. Ce manque de patriotisme à un niveau national est malheureusement transposé à un niveau continental où, les dangers qui menacent un pays frère laissent complètement indifférents les autres pays. Voilà comment le manque de patriotisme national se vit aussi à un niveau continental. Un petit exemple qui paraîtra banal pour certains : sauf à se tromper, en faisant le tour des hymnes nationaux des pays africains, seul le Mali chante dans son hymne nationale, en même temps le Mali et l'Afrique : « Ô pour l'Afrique et pour toi Mali, les champs fleurissent d'espérance. » Autrement, chaque pays africain ne fait que se chanter et se célébrer lui-même, dans son hymne national, en toute ignorance de l'Afrique. C'est le prix de la désintégration.
- Notre système éducatif : dans un système éducatif normal, c'est dès l'école primaire, en passant par le collège, le lycée et l'université que les valeurs collectivement partagées au niveau national sont enseignées aux élèves et étudiants. En effet, l'acculturation de l'agent social ne se fait pas du jour au lendemain. C'est un processus qui s'inscrit dans le long terme à travers les apprentissages culturels, l'intériorisation des normes...etc. Ceci est d'autant plus important qu'au 21ème siècle, nous sommes dans le siècle de la mobilité, un siècle mouvant, où, les trajectoires de socialisation des agents sociaux s’intensifient et se complexifient. Un siècle aux changements rapides, où, les us et coutumes varient plus rapidement que prévus avec l'émergence de nouvelles catégories sociales comme par exemple celle dite de « citoyens du monde », sans oublier les nouvelles normes universellement partagées et parfois localement ignorées que ces changements entraînent, toute chose qui rend difficile l'acclimatation du citoyen à son milieu ambiant. Plus que jamais, nos systèmes éducatifs nationaux sont appelés à se soumettre aux exigences de rigueur, de qualité, de performance qu'appellent ces profondes mutations du monde tout en gardant du passé, l'essentiel de ce qui constitue les bases, les repères de nos nations. Or, en Afrique, soit on fait des réformes et alors on fait table rase du passé y compris de ce qu'il a de précieux, soit on ne fait pas de réforme et alors on conserve le passé, tout le passé, y compris ses archaïsmes. Dans les cas où, on opère des réformes pour vider entièrement le passé y compris ce qu'il a de précieux, on pourrait citer l'exemple de l'enseignement de l'Instruction Morale et Civique. Autrefois, cette discipline permettait d'enseigner les valeurs morales et éthiques de la république aux enfants. Or, de nos jours, certains pays africains, cet enseignement essentiel a été radié. Ainsi, cette matière qui enseignait l'esprit de groupe et l'amour de la patrie étant bannie du système éducatif, l'égoïsme ne peut être que renforcé en chaque intellectuel africain, et la désintégration nationale et continentale ne peut qu'avoir le vent en poupe.
- Notre cupidité maladive : L'histoire de France nous enseigne une catégorie sociale qui a porté l’État à bout de bras à l'ère révolutionnaire sans demander le moindre sous : il s'agit des Volontaires nationaux pendant la Révolution. La même histoire de France nous enseigne le service de l’État rendu par les Hussards noirs : ces instituteurs vêtus de noirs qui allaient dans les campagnes les plus reculées pour instruire les populations, avec un salaire de misère. Concernant les Hussards noirs, les instituteurs de l'ère coloniale les avaient incarnés. Et c'ets grâce à eux que l'Afrique a des intellectuels aujourd'hui. Mais pour ce qui concerne les Volontaires nationaux, force est de reconnaître que ce type d'action relevant de la gratuité n'est pas envisageable en Afrique de nos jours. Cette Afrique d'aujourd'hui, où, l'argent règne en maître. En effet, en Afrique, peu de personnes acceptent de faire le bénévolat. Ainsi, l'argent est un des problèmes majeurs des intellectuels africains. En effet, si les intellectuels africains n'arrivent pas à s'unir pour déployer ensemble leurs compétences et guérir l'Afrique de plusieurs de ses maux, c'est tout simplement pour un problème de fric ! Aucun Africain n'accepterait d'aller contribuer à une réflexion sur l'Afrique sans être payé. Et donc, pour faire déplacer un intellectuel africain pour la cause de l'Afrique, non seulement, il faut payer son déplacement, lui verser une prime, mais encore il faut financer son séjour. Or, comme personne n'a les moyens de prendre en charge tout le monde, c'est-à-dire toutes les compétences requises pour résoudre les problèmes de l'Afrique, ces problèmes restent en l'état. Et comme la plupart de ces problèmes naissent de la désintégration, en maintenant ces problèmes en l'état, c'est la désintégration qui en sort grandie. Le temps est sans doute venu pour les filles et fils d'Afrique d'apprendre à donne rà l'Afrique sans rien exiger en retour.
- Le désintérêt des pouvoirs publics : Que l'on soit à un niveau national ou que l'on soit à un niveau continental, c'est en toute indifférence que l'Afrique entière subit inéluctablement le fardeau de la désintégration. Sans doute parce que les acteurs politiques tirent un grand profit de la division entre les citoyens selon la maxime « diviser pour régner », rien n'est entrepris pour juguler le phénomène. Ainsi, à défaut de tout effort pour endiguer un mal suffisamment dévastateur, il ne fait que s'étendre, et se propager pour gangrener le tissu social. Les Etats africains devraient sans doute songer à financer des comités de réfléxion regroupant des experts nationaux, imprégnés des réalités locales, régionales, nationales et continentales. Le développement de l'Afrique pourrait être à ce prix.
Quoi
qu'il en soit, cette désintégration en Afrique, véritable bactérie
qui a contaminé tous les domaines de la vie nationale et
continentale n'épargne aucun secteur de la vie sociale sur le
continent. Pour exemples, la désintégration est l'aliment du vice
de l'Incompétence (I) de même qu'elle est la source de la
discrimination dans le secteur bancaire (II).
I)
LE VICE DE L'INCOMPETENCE NOURRI PAR LA DESINTEGRATION
Il
fallait s'y attendre de toute façon. Laisser prospérer la situation
de désintégration sans lui opposer de résistance, c'était ouvrir
la boîte de pandore à la médiocrité et par delà même au
développement tous azimuts du vice de l'incompétence. Pour s'en
rendre compte, il suffit de voir les nominations aux postes de
responsabilité tant au niveau administratif (A) qu'au niveau
syndical (B).
A)
Le vice de compétence dans la fonction publique nationale
Dans
un système où, c'est l'appartenance tribale, l'appartenance
régionale ou l'appartenance religieuse qui rétribuent, et non pas
la méritocratie, l'attribution des postes dans la fonction publique
ne connaît pas de rigueur, encore moins de prise en compte des
compétences. En effet, les nominations aux fonctions publiques,
voire étatiques se font sur des critères subjectifs plutôt que
sur des critères objectifs. Dans cette perspective, le plus souvent,
celles et ceux qui occupent les postes à la fonction publique et
même dans le secte privé ne sont pas forcément les plus
compétents, ni même les plus qualifiés. Cela veut dire qu'en
Afrique, les bonnes personnes ne sont pas toujours aux bons endroits.
En effet, on nomme les agents à des postes de responsabilité, pas
en fonction de la rentabilité qu'ils sont censés offrir au pays, à
l’État, à la nation, mais plutôt pour le plaisir qu'on entend
leur procurer avec leur groupe d'appartenance ou leur groupe
d'identification.
Un
autre vice de l'incompétence qui relève d'une singularité
africaine est l'attribution de portefeuille ministériel aux médecins
et aux pharmaciens. Alors que les médecins sont formés pour soigner
les malades dans les hôpitaux, les chirurgiens formés pour
travailler dans les blocs opératoires, les pharmaciens pour veiller
à la dispense régulière de remèdes aux patients, on les retrouve
à la tête de ministère, s'occupant de questions administratives.
Or, ironie du sort, l'Afrique est le continent qui manque le plus de
personnels de santé dans certains pays.
Le
vice de l'incompétence consistant à nommer un agent incompétent à
la place qu'il ne maîtrise pas, aggrave la désintégration
économique de nos pays, il est défavorable au développement de nos
États. Le problème est que la pratique n'a pas été inventée par
un Parti Politique. Elle existe depuis les indépendances des pays
africains où, les gouvernants africains successifs ont eu un goût
immodéré du népotisme. Alors, ce qu'a fait le gouvernement
précédent, en vertu de quoi le gouvernement qui lui succède ne le
ferait pas ? Ainsi va l'Afrique.
B)
Le vice de l'incompétence dans le syndicalisme africain
Selon
le Dictionnaire Larousse, le syndicalisme est un « Mouvement ayant
pour objectif de grouper des personnes exerçant
une même profession en vue de la défense de
leurs intérêts.»
Précisions aussi que dans les pays développés, depuis le 19ème
siècle, l'action syndicale est à l'origine de grandes réformes
sociales et plusieurs acquis sociaux reconnus comme tels aujourd'hui
sont l’œuvre des syndicalistes. En effet, les syndicalistes qui se
regroupent pour défendre une cause n'ont à cœur que cette cause,
et si le plus souvent, leur lutte finit par être couronnée de
triomphe, c'est surtout à cause de leur détermination mais surtout
à cause de leur unité. Par ailleurs, le leader syndicaliste est
librement choisi par les militants en fonction de ses talents. En
Afrique, l'action syndicale échoue le plus souvent pour les raisons
suivantes :
- très souvent, les syndicats sont le soubassement des Partis Politiques et parfois même l'instrument au service du pouvoir en place pour manipuler le peuple.
- Le mouvement syndical africain se désintègre pour des motifs tribaux et religieux. Le groupe ethnique du leader pourtant choisi démocratiquement par l'ensemble du groupe finit par mettre la main sur l'ensemble du syndicat pour se comporter comme s'il en était le propriétaire.
- Le vice de l'incompétence finit par l'emporter sur la méritocratie car le leader syndical tombe dans la tentation de nommer aux postes clés du syndicat, les siens, c'est-à-dire, celles et ceux de sa famille biologique, ou de son groupe ethnique, ou de son groupe religieux.
- Les incompétents étant aux affaires, forcément, l'action syndicale prend du plomb dans l'aile.
- Le syndicat part en brioche.
- Pour finir, pour la même cause, on a plusieurs syndicats satellites qui naissent, pour fonctionner sur les mêmes bases tribales, familiales et religieuses que le syndicat originel.
- Il résulte que les mêmes syndicats défendant la même cause se transforment en syndicats opposés qui se combattent mutuellement.
- Par la suite, plus de syndicats porteur d'un idéal à défendre.
- Et puis, aucune cause syndicale a défendre si ce n'est la lutte pour promouvoir son propre syndicat.
- Finalement, sans cause à défendre, il n'y a pas de triomphe, et donc pas de réforme sociale d'envergure. Tout est au point mort, c'est-à-dire qu'on retourne à la case départ.
Pour
tout dire, la désintégration nationale et continentale, l'Afrique
la paie assez cher. Elle n'épargne aucun domaine de la vie. Même le
secteur bancaire y passe.
II)
UN SECTEUR BANCAIRE AFRICAIN DISCRIMINATOIRE
La
désintégration dans le secteur bancaire africain provient du fait
que ce secteur laisse sur le banc de touche une majorité de la
population (A) alors que les moyens de les inclure ne manque pas (B).
A)
L'exclusion du secteur bancaire de la majorité de population
africaine
Ces
dernières années, s'il y a un mot qui est revenu le plus souvent
sur les lèvres en Afrique, c'est celui de « bancarisation ».
Cela veut dire que l'Afrique vient de prendre conscience que la
majorité de sa population active et une grande partie de sa
population passive ne possèdent pas un compte bancaire. La
population active, ce sont ces millions de jeunes et d'adultes qui
travaillent au quotidien, produisent des richesses, font fonctionner
l'économie nationale mais aussi l'économie continentale, mais, qui,
par injustice, ne possède aucune protection sociale.
La
population passive, c'est la population active d'hier qui a créé
des richesses pour fortifier l'économie nationale et continentale,
mais qui au soir de la vie, a vu ses forces diminuées. Sans
protection sociale, elle continue de travailler malgré l'âge et la
fatigue, pour pouvoir se nourrir et nourrir son clan.
Pour
plusieurs motifs, valables ou farfelus, ces populations issues
majoritairement du secteur informel ne possèdent pas de compte
bancaire. En effet, pour certains, l'illettrisme et l'analphabétisme
ne facilitent pas la bancarisation d'une majorité d'Africains. Le
problème est que malgré l'illettrisme et l'analphabétisme, les
pays africains arrivent quand même à recenser leurs populations
respectives et savent au moins le nombre de leurs habitants et le
nombre de leurs électeurs ! Cela, pour dire que le motif de
l'illettrisme et de l'analphabétisme n'est pas valable pour exclure
un nombre aussi important de producteur de richesses de nos systèmes
bancaires. C'est sans doute ce que semblent comprendre bon nombre de
pays africains. En effet, on peut penser que, si ces dernières
années, de plus en plus de pays africains évoquent le mot
« bancarisation », c'est justement parce qu'ils pensent
de plus en plus à mettre en place des politiques sociales comme par
exemple l'assurance maladie et les allocations familiales, deux
politiques sociales complètement inconnues en Afrique surtout
lorsque l'on vit en campagne, ou alors, lorsque l'on vit à la ville,
mais qu'on a en commun, avec les campagnards, de travailler dans le
secteur informel. Ainsi donc, l'Afrique commence à penser à ces
politiques sociales majeures. Et c'est ainsi qu'elle découvre
subitement que sans un compte bancaire, de telles politiques sont
impossibles à mettre en place. C'est le lieu de rappeler que la
bancarisation des populations africaines peut se faire en un temps
record, pourvu que les États africains le veuillent.
B)
L'inclusion de toutes les populations africaines dans le secteur
bancaire : une justice sociale
Le
secteur bancaire africain ne peut pas durablement contribuer à la
déchirure sociale trop grande déjà, en continuant d'exclure une
grande partie de la population. Rien ne justifie une telle situation
qui s'apparente à une évidente injustice sociale. Que la
désintégration fasse ses effets dans d'autres domaines qui ne
rapportent pas de l'argent à l’État peut se comprendre. Mais que
la désintégration aille jusqu'à affecter le portefeuille même des
pays Africains y compris celui du continent, voilà qui devient
abject dans l'absolu. Mais de toute façon, on n'a pas besoin d'être
riche, ni même d'enrichir l'Etat, avant de posséder un compte
bancaire. Pour exemple, en Europe, on peut ouvrir un compte bancaire
sans le moindre sou. En France même, pour ouvrir un compte d'épargne
Livret A, il faut seulement débourser 1,50 Euro. L'Afrique peut donc
bancariser toute sa population en permettant à tout le monde d'avoir
un compte bancaire sans forcément y mettre de l'argent. Par
ailleurs, les États africains ont des moyens efficaces pour
bancariser rapidement leurs populations si tel est leur souhait
véritable. Et déjà, nous leur indiquons trois moyens qu'ils savent
bien employer quand ils le veulent bien :
- le modèle du recensement
En
Afrique, les agents préfectoraux se déplacent dans les campagnes,
villages et quartiers pour recenser les populations sur la place
publique. Chaque citoyen vient alors avec la liste des personnes à
sa charge à commencer par lui-même et son épouse, leurs enfants,
les neuves et nièces, les personnes âgées ne pouvant se
déplacer...etc., pour se faire recenser. Il arrivent même que les
agents de recensement se déplacent de concession en concession pour
atteindre les familles et les clans. Aujourd'hui, au temps des
ordinateurs, les banques peuvent utiliser le modèle du recensement
de la population pour bancariser tout le monde.
- Le modèle des inscriptions scolaires
En
Afrique, à chaque rentrée des classes, chaque parent, muni des
extraits de naissance de ses enfants à scolariser se rend lui-même
à l'école pour rencontrer les autorités administratives et
procèdent ainsi à l'inscription des enfants à charge à l'école.
Sur convocation à leurs sièges des chefs de familles, munis des
extraits de naissance de chaque personne, enfant ou adulte à charge,
les banques peuvent en un temps record, bancariser toutes les
populations.
- L'enregistrement par tranche d'âge
En
procédant par enregistrement des citoyens par tranche d'âge, la
bancarisation des populations africaines peut se faire sans
difficulté. Par exemple :
- Septembre-Novembre : la bancarisation des enfants de zéro à quinze (0-15) ans.
- Décembre-Février : la bancarisation des seize-vingt-cinq (16-25) ans
- Mars-Mai : la bancarisation des vingt-six - trente-cinq (26-35) ans
- Juin-juillet : la bancarisation des trente-six-quarante-cinq (36-45) ans
- Août : la bancarisation des quarante-six ans et plus (46 ans et +).
- La bancarisation dès la naissance
Les États peuvent imposer l'ouverture d'un compte bancaire pour chaque enfant qui naît. Ainsi, dès la naissance d'un bébé, sa déclaration à l'état civil doit être suivi d'une ouverture de compte à son nom. Par exemple, en France, certaines communes offrent un chèque à chaque bébé qui vient de naître. Le chèque étant établi à l'ordre de l'enfant, cela contraint les parents à lui ouvrir immédiatement un compte bancaire à son nom. C'est un modèle qui peut être imité.
Inutile
de le rappeler, la bancarisation des populations marque
incontestablement la modernisation de la vie publique.
Yèble
Martine-Blanche OGA épouse POUPIN
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