LES
ASPIRATIONS PROFONDES DES PEUPLES AFICAINS
A
LA DEMOCRATIE ET AUX DROITS DE L'HOMME
EN
BUT A UNE REALITE : L'INCOMPATIBILITE ENTRE FEODALITE ET
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
Au
village africain, la sagesse enseigne que l'attention, le courage, la
maîtrise de soi, l'écoute et le questionnement sont consubstantiels
à l'apprentissage. Cela veut dire que pour la sagesse africaine,
quiconque veut apprendre dans la vie, les vertus cardinales à
cultiver sont l'attention, le courage, la maîtrise de soi, l'écoute
et le questionnement. Conformément à la sagesse africaines, ces
vertus cardinales sont valables dans le cadre tout apprentissage sans
exception. Et la sagesse africaine précise que tout au long de la
vie humaine, on apprend à toute occasion. Et toute occasion est
faite pour tirer des leçons et apprendre. Et il n'y a pas une seule
occasion qui ne puisse offrir des leçons à tirer, des connaissances
à apprendre. Ainsi par exemple, l'on apprend sur soi-même en
écoutant les autres. Et l'on apprend sur soi-même dans es reproches
et autres récriminations formulés par les autres. La sagesse
africaine va jusqu'à affirmer que même les injures proférées à
l'endroit d'un individu peuvent aider ce dernier à se découvrir
autrement. Mais dans tous les cas, les seules conditions requises
pour tirer profit de ces occasions d'apprentissage sur la vie, sur
l'environnement, sur la société, sur soi-même...etc., sont :
l'attention, le courage, la maîtrise de soi, l'écoute et le
questionnement.
Tout
d'abord, l'attention pour mieux entendre et comprendre l'occasion qui
s'offre en apprentissage.
Ensuite,
le courage pour aller jusqu'au bout de l'apprentissage. Et puis, la
maîtrise de soi pour éviter l'emportement, devant les situations de
choc. Par ailleurs, l'écoute pour une qualification juste de ce que
l'on entend, afin d'éviter des contresens, des quiproquos, des
amalgames et des confusions.
Enfin,
le questionnement, pour analyser en profondeur, l'objet propice à
l'apprentissage. Rappelons que ce processus d'apprentissage proposé
par la sagesse africaine est difficilement applicable dans les
situations conflictuelles. En effet, comment être attentif lorsque
l'on se retrouve devant l'adversité ? Et comment avoir le
courage d'écouter une personne vous débiter des insultes ?
Est-il possible d'avoir la maîtrise de soi, en gardant le sang froid
face à ce qui s'assimile à des injures par exemple ? Peut-on
résister à l'esprit de vengeance quand l'on se sait attaqué à
tort ou à raison, de façon physique ou de façon verbale ? Et
pour finir, peut-on consacrer son temps à se questionner sur des
propos tenus par une personne considérée comme hostiles à nos
intérêts communs et personnels ?
On
le voit bien, le processus d'apprentissage selon la sagesse africaine
est difficile. Surtout dans monde dominé par la concurrence où l'on
cultive l'esprit du tic au tac. En effet, cette culture du tic au tac
empêche considérablement l'Afrique au Sud du Sahara d'apprendre, et
de progresser. C'est exactement ce qui s'est passé il y a quelques
années. En effet, il y a quelques temps, la rumeur a attribué à
l'ancien président de la République Française, Monsieur Jacques
Chirac, cette phrase :« la Démocratie était un luxe
pour l'Afrique ». Si nous avions opté pour le processus
d'apprentissage préconisé par la sagesse africaine tel que détaillé
ci-dessus, voici quelle aurait été notre attitude :
Tout
d'abord, on se serait montré attentif devant cette affirmation.
Ensuite, on ferait preuve d'un courage à tout épreuve pour aller à
la compréhension de cette assertion. Et puis, chacun de nous allait
se maîtriser pour éviter la colère et l'emportement ; chacun
de nous aurait gardé son sang froid, en vue d'une sérénité
permettant une interprétation objective de cette phrase. En outre,
on serait à l'écoute, en cherchant à comprendre ce qu'a voulu nous
dire le président Jacques Chirac. Enfin, on se serait posé des
questions non seulement sur nous-mêmes, mais encore les mobiles qui
ont poussé le Président Chirac à s'exprimer ainsi.
A
défaut de nous inscrire dans le processus d'apprentissage africain
en procédant étape par étape au découpage de la pensée
chiraquienne, chacun en est allé de sa propre interprétation. Comme
toujours, lorsqu'il s'agit d'un problème concernant l'Afrique. Guidé
par l'esprit traditionnel du colportage de l'information, esprit du
colportage très libre mais aussi très volatile, chacun a décidé
de véhiculer cette phrase du président Chirac selon son
entendement. Les uns ont évoqué un racisme du président Chirac
envers les Africains. D'autres y ont vu une manœuvre pour empêcher
l'Afrique d'accéder à la Démocratie. Certains y ont vu de pures
insultes. Et une fois la colère tombée, plus rien n'a suivi. Bien
dommage !
« La
démocratie est un luxe pour l'Afrique. » Dixit Monsieur
Jacques Chirac. Voilà une phrase qui a fait couler beaucoup d'encre,
mais dont on a tiré aucune leçon pour faire progresser l'Afrique.
Il est utile de procéder à une analyse de cette phrase attribuée
au président Jacques Chirac.
D'emblée,
la Démocratie. C'est une forme de gouvernement du peuple par le
peuple. En l'espèce, le peuple est souverain. Quant au mot « luxe »,
voici comment la lexicographie le définit :
« Pratique
sociale caractérisée par des dépenses somptuaires, la recherche de
commodités coûteuses ou de biens raffinés et superflus, souvent
par goût du faste ou désir d'ostentation. […] Consommation
improductive, somptuaire de biens coûteux, raffinés, superflus. […]
Ensemble des biens coûteux ou parfois raffinés qui sont consommés
ou dont on fait étalage par goût du luxe. »1
Ajoutons que le mot «Luxe» a
pour synonymes le gaspillage,
l'abondance, l'excès, le superflu, la surabondance.
Après ces précisions, la phrase « La démocratie est un luxe
pour l'Afrique » du président Chirac peut s'entendre comme :
« la Démocratie est un
gaspillage, une abondance, un excès, un superflu, une
surabondance....pour l'Afrique. »
Et si tel est le cas, c'est parce que l'organisation politique des
sociétés traditionnelles africaines, laquelle est féodale, et
reprise par l'Afrique moderne ne peut pas s'accommoder de la
démocratie. Cette organisation féodale rend la Démocratie
superflue, elle en fait un excès, une surabondance voire un
gaspillage. En clair, la Démocratie est inadaptée au contexte
féodale. Et pour mieux comprendre cette inadaptation de la
Démocratie à la féodalité, il convient de définir d'une part
l'organisation politique des sociétés africaines (I), et d'autre
part, l'organisation politique des sociétés modernes, plus
précisément, le système républicain II).
- L'ORGANISATION POLITIQUE DES SOCIETES AFRICAINS :UNE ORGANISATION FEODALE
L'organisation
politique africaine basée sur la féodalité est caractérisée par
la personnalisation du pouvoir politique (A) et la distributions de
droits féodaux (B)
A)
Une personnalisation excessive du pouvoir politique
« La
Féodalité est un système qui organise le pouvoir politique sur des
liens de fidélité, des liens contractuels et sur des liens de
parenté et de lignage, la traduction concète en est le Fief. »
2
En Afrique, à
cause du système féodal, tout tourne autour de la personne de
celles et ceux qui détiennent le pouvoir politique. Tout se passe
comme si ces derniers avaient droit de vie et de mort sur l'ensemble
de la population. Il faut passer exclusivement par leur intermédiaire
pour garantir une vie heureuse à soi-même, et à ses
proches. Les contredire, c'est signer son arrêt de mort. En effet,
ne pas s'entendre avec le chef, le détenteur du pouvoir, c'est être
exclu de tous les services publics. Le système féodal en général
encourage :
- l'autocratie : le gouvernement par un individu
- l'oligarchie : le gouvernement par quelques individus; parfois un nombre est spécifié
Et
en Afrique, le système féodal encourage :
- l'ethnocratie, appelée aussi la démocratie ethnique : qui est le gouvernement par un groupe ethnique particulier
C'est
à cause de cette personnalisation excessive du pouvoir que le
président OBAMA disait dans son discours d'Accra :
« L'Afrique
n'a pas besoin d'hommes forts, mais d'institutions
fortes ».
En effet, dans le fonctionnement féodal, le chef contrôle tous les
pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire. En effet, il
nomme ses procès à ces postes clés, et ceux-ci ne sont ni
indépendants, ni impartiaux dans l'exercice de leurs fonctions.
C'est un pouvoir totalitaire qui s'exerce dans le système féodal.
Dans
un système féodal, l'existence de nombreuses servitudes pour les
individus fait obstacle à la promotion des droits et libertés
privés et publics. C'est le suzerain qui distribue, selon son plein
gré, son bon vouloir, quelques avantages et privilèges à celle ou
celui qu'il agrée.
B) Une distribution arbitraire des droits
féodaux
« La Féodalité est
une organisation politique et sociale qui a été dominante en Europe
de l'Ouest du Xème au XVème siècle. Elle est issue d'une tradition
germanique qui lie le chef à son compagnon d'armes, en contrepartie
le chef protège ses fidèles et leur confie des missions
importantes. » 3
Dans
le contexte féodal africain, la distribution des droits féodaux a
lieu à plusieurs niveaux :
- en milieu familial, dans les milieux ruraux, où, les propriétaires terriens sont en général des héritiers de droit masculin et de droit d'aînesse. Les plus jeunes et les filles de la fratrie né bénéficiant d'aucun héritage.
- Entre citoyens : le racket exercé par certains citoyens sur d'autres citoyens qui sont ainsi dépouillés de leurs biens patrimoniaux est une pratique qui rappelle les impôts primitifs que sont le pillage et le tribut. Des impôts qui portent l'empreinte de la féodalité.
- En milieu urbain : l'attribution des postes administratifs, économiques, financiers et politiques est arbitraire et n'obéit à aucun critère objectif si ce n'est par fidélité ou par services rendus à celle ou celui qui gère les postes en question.
On
le voit bien, le système féodal n'est pas comparable au système
républicain, c'est la nuit et le jour.
II) L'ORGANISATION POLITIQUE DES SOCIETES
MODERNES : LE SYSTEME REPUBLICAIN
L'organisation
politique des sociétés modernes repose sur le système républicain
fondé sur la démocratie (A) et la reconnaissance de droits civiques
et des droits de l'homme aux citoyens (B)
A)
La Démocratie : forme de gouvernement valable pour les sociétés
modernes et républicaines
La
République vient du mot latin « « res
publica », qui veut dire « affaire publique » ou
plus littéralement « chose du peuple ». »4
Au
sein de la République, le pouvoir appartient au peuple qui l'exerce
par ses élus et à travers les institutions : l'exécutif, le
Parlement, la Justice ; mais aussi à travers les fonctions :
le Président de la République, le Premier Ministre, les
Ministres...etc. Le peuple étant souverain, tout est public, et rien
n'est personnel. Rappelons-nous, le mot Public vient du mot peuple.
Alors que le mot personnel se rattache à tout ce qui provient d'une
ou plusieurs personnes. De ce fait, contrairement au système féodal,
au sein d'une République, aucune autre forme de gouvernement n'est
admise à part la Démocratie qui est « le gouvernement
par le peuple, soit directe (par référendum ou assemblée
populaire) soit par des élections (forme représentative) »5
«Le terme démocratie (du grec ancien δημοκρατία /
dēmokratía, aujourd'hui souvent interprété comme « souveraineté
du peuple », combinaison de δῆμος / dêmos, « peuple » et
κράτος / krátos, « pouvoir », ou encore kratein, «
commander »), est le régime politique dans lequel le peuple a le
pouvoir »6
Dans une République réellement démocratique, on privilégie le
gouvernement par la Méritocratie, c'est-à-dire, le gouvernement
fondé sur le mérite et non les privilèges. De même,
l'administration est de type bureaucratique. Pareillement, la
République démocratique est caractérisé par le respects des
droits de l'homme et des droits civiques
B)
Une reconnaissance de droits civiques et des droits de l'homme aux
citoyens
On
parle de droits civiques pour souligner le fait que les citoyens sont
électeurs et éligibles à leur majorité. Les droits civiques ne
peuvent être déniés aux individus sauf s'il s'agit de mineurs,
d'adultes frappés d'incapacité, placés sous tutelle ou sous
curatelle, s'il s'agit de personnes privées de l'exercice de leurs
droits civiques à cause d'actes répréhensibles. Dans tous les cas,
seul la loi peut exclure les citoyens de l'électorat. S'agissant
des droits de l'homme, ils figurent dans la Déclaration des Droits
de l'Homme (DDHC)de 1789, dans le préambule de la Constitution
française de 1946 et dans la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme de 1948. Certains sont dit imprescriptibles et ce sont :
le droit de propriété, le droit à la sûreté, le droit à la
sécurité, le droit à la résistance à l'oppression. Or, si
l'on s'en tient aux droits civiques, c'est-à-dire, le droit d'être
électeur et le droit d'être éligible, on constate qu'en Afrique,
dans de nombreux pays, ces droits civiques sont bafoués. Des
candidats à des élections ont ont été arbitrairement exclus.
Parfois, il existe des lois iniques expressément mises en place pour
empêcher certains citoyens d'être candidats à certaines élections.
Tantôt, certains candidats ont vu leur élection volée. Cela veut
dire qu'on les a laissés se porter candidats à l'élection. Ils ont
gagné l'élection. Mais, leur victoire leur a été subtilisée, et,
à la place de leur victoire, la malice a consacré leur défaite. Et
si on en vient au droit de vote, là aussi, force est de constater
que ce droit n'est pas respecté. En effet, en Afrique, vote qui
veut. Même si on ne remplit pas les conditions requises pour être
électeurs, on vote quand même. Du coup, des mineurs votent, des
étrangers votent, des incapables physiques et moteurs votent, et des
morts aussi votent.
Pour
les droits de l'homme, il suffit de lire la presse africaine pour se
rendre compte qu'ils n'existent même pas. Avec l'insécurité
grandissante, les droits imprescriptibles que sont la sécurité, la
sûreté, le droit de propriété et la résistance à l'oppression
sont comme caduques.
Dans
ces circonstances, que peut-on penser de la réflexion du Président
Jacques Chirac lorsqu'il a dit : « La Démocratie est un
luxe pour l'Afrique » ?
On
peut répondre que sa réflexion est pertinente, judicieuse et juste
pour deux raisons :
- La Démocratie suppose que l'on soit dans une République. Ce qui n'est pas le cas de l'Afrique qui a un fonctionnement politique de type féodal. On ne peut pas greffer un système politique en l'espèce la Démocratie sur un autre système politique, c'est-à-dire, la Féodalité. Dans ce cas, c'est effectivement un « luxe », c'est-à-dire, une surabondance, un superflu, un excès, un gaspillage.
- Dans une Démocratie, c'est-à-dire dans une République Démocratique, les droits de l'Homme sont respectés. Or, ce n'est pas le cas de l'Afrique où les droits et libertés sont foulés au pied, parce que justement, nous sommes simplement dans des républiques de nom. Mais dans les faits, nous sommes dans un régime féodal. Or, il est de notoriété que le système féodal méconnaît les droits de l'Homme. C'est la République Démocratique qui octroie les droits de l'Homme.
Au
terme de cette réflexion, on le voit bien, les aspirations profondes
des peuples africains à la démocratie et aux droits de l'Homme sont
sérieusement compromis par le système féodal. En effet, il y a une
incompatibilité entre la République démocratique et la Féodalité.
Et
c'est le président Guinéen Ahmed Sékou Touré qui a raison. A ces
dernières années de pouvoirs, il a effectué une visite officielle
en France dont les vidéos sont encore visibles sur Internet. Dans
son discours aux officiels français, il a justement soulevé cette
difficulté de promouvoir la Démocratie dans une Afrique à
l'organisation féodale. Paix à son âme !
Le
travail qui s'impose en Afrique en ce début du 21ème siècle est
assurément le démantèlement total de ce système féodal, seule
condition pour promouvoir une République Démocratique sincère et
vraie, ainsi que les droits de l'Homme. Le Président Burkinabè
Thomas Sankara avait perçu le problème, lui qui avait commencé par
démanteler la structure féodale dans son pays. Paix à son âme !
En
tout cas, l'UPACEB est prête à participer pleinement à ce travail
incontournable pour l'émergence d'une Afrique moderne et
démocratique, respectueuse des droits de l'Homme.
Yéble
Martine-Blanche OGA-POUPIN
1http://www.cnrtl.fr/definition/luxe
2http://www.francebalade.com/histo/feodalite.htm
3In
Histoire de France, Moyen Age La Féodalité au Moyen-Age
4In
Wikipédia
5In
Wikipédia
6In
Wikipédia
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